- Posted: 7 février 2022
Le cochon d’Où Don
Parmi ces diverses actions, l’association Les Bouillonnantes organise des visites chez des artisans et temps d’échanges entre les Chefs du bassin nantais et les paysans et artisans de la région. Nous vous racontons ici ces rencontres.
Date : 07/03/2022
Texte : Ludivine Vinet
Photos : Paul Stefanaggi
Des cochons élevés en semi-liberté, sur foin.
Dès sa première année d’installation, Jérémy a converti l’ensemble des terres en agriculture biologique dont les 2/3 sont consacrées à la culture de céréales afin de produire le tourteau nécessaire à l’alimentation de ses animaux. Le tiers restant est en herbage et lui donne le foin qui permet de pailler ses cochons. S’il est plus courant de voir les éleveurs utiliser de la paille, le choix opéré par Jérémy de privilégier le foin répondait initialement à des contingences économiques et s’est finalement avéré gustatif, au vu des retours de ses clients Chefs.
Pour l’entretien et la récolte de l’ensemble de ces cultures, Jérémy fait appel à une entreprise agricole externe, ce qui lui permet de réduire son investissement en machines et en personnel pour se concentrer sur le savoir-faire qu’il maîtrise le plus : l’élevage. Il pratique par ailleurs la rotation des cultures afin de casser le cycle maladif. Ces cultures nourries du fumier de ses animaux lui permettent par ailleurs d’être en grande partie autonome dans l’alimentation de ses animaux et de garantir une agriculture entièrement biologique.
Un élevage de 60 mères
La ferme du Cochon d’Où Don compte pas moins de 5 bâtiments correspondant chacun à différents stades de vie des cochons (reproduction, maternité, engraissage…). Accompagné de 2 apprentis, Jérémy Diais y élève 60 mères et leurs descendances, qui représentent pas moins de 600 à 700 animaux.
Les truies sont réparties en groupe de 20 et vont se reproduire 2 fois par an (contrairement à d’autres animaux comme les chèvres et les brebis, les cochons ne connaissent pas de saison de reproduction). Chaque truie va alors donner entre 10 et 20 porcelets par portée, mais ne dispose que de 13 à 15 tétines. Dès leur naissance, chaque porcelet choisira sa tétine auprès de sa mère ou d’une mère nourrice et la gardera jusqu’au sevrage sans jamais en changer ou sans que celle-ci puisse être utilisée par un autre. Ainsi, en faisant en sorte que chaque bande de truie mette bas la même semaine (après 3 mois, 3 semaines et 3 jours de gestation), l’éleveur s’assure de pouvoir nourrir toute la descendance pendant les 6 semaines nécessaires jusqu’au sevrage.
Après ces 6 semaines (contre 3 en conventionnel), les porcelets sont sevrés et quittent la maternité pour rejoindre un bâtiment avec un large accès à l’extérieur. Bien qu’ils soient nés en même temps, on constate alors des différences de taille liées notamment aux tétines contenant moins de lait.
Pourquoi ces choix de races ?
Aujourd’hui, Jérémy élève 2 races différentes sur son exploitation : les larges white reconnues pour leur qualité nourricière et les duroc, race notamment utilisée pour la production de porc ibérique et qui a la particularité de donner une viande très persillée, où le gras n’est pas trop prédominant. Deux races autonomes vers lesquelles Jérémy s’est tourné puisqu’elles sont adaptées à un élevage en bâtiment (contrairement au Porc Blanc de l’Ouest, la race locale qui préfère quant à lui le plein air).
On trouve aussi sur la ferme des verrats souffleurs, nés sur l’exploitation et utilisés pour la reproduction des truies. La demande étant différente en circuit long, Jérémy crée aussi des croisements avec des porcs piétrain, une race présentant la particularité de développer beaucoup de muscle et d’être peu grasse. Si cela correspond à une demande des consommateurs, l’éleveur ne cache pas que, selon lui, cela donne une viande moins intéressante gustativement.
Chaque cochon, avec ses particularités et ses propres caractéristiques de croissance, est suivi individuellement par Jérémy tout au long de sa vie sur la ferme afin qu’il bénéficie de l’alimentation nécessaire à son engraissement et que chacun atteigne leur maturité au moment voulu.
Repenser son modèle
Si le bien-être de ses animaux était quelque chose auquel Jérémy Diais était particulièrement sensible, l’agriculture biologique et la vente directe n’était pas nécessairement central dans son projet initial.
Souhaitant travailler avec les marchés du circuit long, capables de lui assurer suffisamment de débouchés, il fait le choix de se tourner vers le bio pour des raisons économiques et pour bénéficier des aides liées à ces pratiques. Rapidement, il se rend compte que cela lui apporte bien d’autres avantages et notamment que par la prévention, ses animaux développent moins de maladie et qu’une bonne organisation lui permet d’avoir un meilleur équilibre de vie.
Je travaille beaucoup sur l’auto-contamination en complément de la vaccination, ce qui me permet d’utiliser les antibiotiques que pour des blessures et des montées en températures graves.
Soucieux de l’impact de son exploitation, Jérémy a récemment replanté des haies et veille ainsi à améliorer la biodiversité de ses terres. N’ayant pas de labo et n’ayant pas le droit d’abattre ses animaux sur sa ferme, il travaille avec une coopérative située à Beaupréau et plusieurs entreprises de transformation qui lui produisent des saucisses et chipolatas pour les écoles, du jambon blanc, du jambon fumé et autres charcuteries. Aujourd’hui, il vend 2 à 3 cochons tous les 15 jours en circuit court (restaurateurs, épiceries, boucheries, vente à la ferme) et 70 par mois en circuit long qui alimentent les grandes surfaces et la restauration collective (et notamment les cantines de la ville de Nantes).
À l’avenir, Jérémy souhaiterait augmenter la vente directe. Il prend donc le temps de recevoir régulièrement les professionnels de la région pour leur faire voir son savoir-faire et les conditions qu’il a mis en place pour favoriser le bien-être de ses animaux.