- Posted: 26 janvier 2020
- Tags: Agriculture, Carte Blanche, Décryptage, Maraîchage, Nicolas Guiet, Permaculture, Quesaco
La permaculture – Quésaco
Textes de Laurence Goubet
Photos de Paul Stefanaggi
à la Micro-Ferme de la Butte à Maisdon-sur-Sèvre (44)
Le terme “permaculture” signifie “agriculture permanente”. Comprenez là, une agriculture pérenne et durable. Mais aussi une agriculture abondante qui ambitionne une production qualitative et quantitative de nourriture, sur un petit espace et en dépensant le moins d’énergie possible.
Si cette pratique est théorisée en 1970 par les Australiens Bill Mollison et David Holmgren qui s’appuient notamment sur un modèle développé par le japonais Masanobu Fukuoka, aujourd’hui, bon nombre de pratiquants vous diront que la permaculture c’est avant tout une philosophie et une éthique avant d’être des préceptes écrits et figés.
C’est aussi souvent un acte militant visant par un changement de paradigme à guérir la terre et ses écosystèmes et à mieux nourrir les hommes.
Une philosophie écologique
Contrairement à mes habitudes, je vais vous parler philosophie avant d’aborder les pratiques et la science. Parce que, en matière de permaculture, cette philosophie est primordiale et pourrait se résumer ainsi : le respect du vivant.
En effet, la permaculture nous invite à prendre la nature comme unique modèle.
Et notamment à observer que le vivant est arrivé sur Terre il y a des milliards d’années, a colonisé les mers jusqu’aux abysses, les sols les plus arides et même l’atmosphère pour former cet environnement que nous côtoyons chaque jour. Cette vie là s’est confrontée à des obstacles, à des évolutions majeures, et n’a eu de cesse de s’adapter, de se réguler naturellement et de se régénérer en toute circonstance.
Cette résilience est à mettre en opposition à la crise environnementale, sociale et sociétale générée par l’homme. Car cette colonisation par le vivant n’est rien d’autre qu’un modèle de vivre ensemble, d’harmonie, d’équilibre et de partage. Et si l’abondance est visée, elle est le maillon d’un cercle vertueux. En effet chaque feuille qui tombe se décompose, retourne dans le sol, l’enrichit, et nourrit ainsi la croissance d’une nouvelle branche.
L’homme est ainsi invité à se faire humble face à cette action naturelle du vivant, à prendre soin de cet écosystème existant et de toutes les espèces qui le composent et à tempérer son égoïsme en comprenant que l’abondance est nécessaire mais ne peut fonctionner qu’à condition d’une redistribution vertueuse des surplus.
Si cette philosophie s’applique avant tout à l’agriculture et aux besoins fondamentaux du vivant, elle tend à inspirer un mode de vie plus global.
Elle peut ainsi être mis en place à différentes échelles, tant pour un potager, une ferme que pour une ville.
Une science naturelle
Si dans cet écosystème, chaque espèce a son rôle a joué, celui de l’homme serait peut-être d’observer.
Je pense que l’humanité n’est pas nécessairement la favorite de la nature, que l’humanité peut très bien disparaître, que nous ne sommes pas une espèce sacrée… On n’est pas l’espèce élue, comme on l’a cru pendant longtemps ; la nature peut très bien se passer de nous. Et elle ne nous éliminera pas ; c’est nous qui pourrions nous éliminer. Et si nous nous éliminons, la nature ne fera pas particulièrement un deuil, mais elle continuera à développer d’autres espèces, en espérant que ces espèces seront plus en mesure de se préserver et de ne pas se détruire.
Hubert Reeves
D’un point de vue plus scientifique, l’agriculture permacole vise à observer et apprécier l’efficacité des écosystèmes naturels dans leur globalité, à analyser ses interactions et ses capacités de résilience avant de reproduire, autant que faire se peut et avec une intervention minimale de l’homme, ce modèle dans un milieu choisi.
Dans les écosystèmes où l’homme n’intervient pas, par exemple en forêt, on observe facilement que chaque espèce est adaptée à son environnement. Le sol se nourrit des plantes qui y poussent puis y meurent, les végétaux de grande taille protègent les plus fragiles du vent ou du soleil, et l’humus provoqué par la décomposition des diverses matières organiques, et grâce à l’action combinée des animaux, des bactéries et des champignons retient l’eau nécessaire à la croissance de ces végétaux.
Ainsi la permaculture vise à développer des systèmes agricoles qui reproduisent ses synergies et cette productivité naturelle et prône notamment
- La diversité des cultures sur un petit espace
- Le “mulch” ou paillis, (paille, branchages, ardoises, pierre…) qui recouvre le sol et a pour but de garder celui-ci humide et d’en réguler sa température
- La récupération des eaux provenant tant des pluies que des écoulements du terrain
- L’interdiction du labour. En effet en retournant les sols (et qui plus est avec des machines de plus en plus puissantes), on enfouit les débris végétaux et on modifie un écosystème organisé où se trouvent en haut les espèces aérobies (ayant besoin de l’oxygène) et en bas les espèces anaérobies (qui ne se développent qu’en l’absence de contact avec l’air ambiant)
- Le compost, les décoctions, les purins, le fumier et autres amendements qui enrichissent le sol en azote et divers oligo-éléments et permettent un fonctionnement en circuit fermé (pas de déchet généré)
- Le stockage des énergies
- L’introduction d’animaux domestiques (poules, lapins, moutons, canards…) et la protection des animaux aquatiques tels que les grenouilles, crapauds, libellules… ayant chacun leur rôle à jouer
- La protection des éléments vivants du sol (vers de terre, micro-organismes, matières organiques diverses)
- L’auto-régulation : laisser faire la nature et réduire au maximum l’intervention de l’homme. Et donc par conséquent : la patience aussi.
- Et évidemment le bannissement des intrants chimiques
Éthique, philosophique et scientifique, la permaculture a identifié des méthodes pour une mise en œuvre fonctionnelle qui ambitionne l’efficacité (production), la soutenabilité (durabilité) et la résilience (à l’infini)
Découvrez dans cet article la mise en pratique de la permaculture
Et l’exemple de la Micro Ferme de la butte installée sur 1,5 ha à Maisdon-sur-Sèvre (44).
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